FICHTRE

Je la revoie me sourire dans notre lit dès que j'ouvrais les yeux. Mais ce matin, elle n'est pas avec moi. Je me remémore combien ces baisers matinaux me mettaient de bonne humeur. Mais ce matin, je n'en aurais pas. Cette idée qu'elle soit aussi loin de moi m'arrache les larmes à mes yeux. J'aimerais dire que je vais bien, que ça ne me touche plus.

Je n'ai personne pour partager ma peine et personne ne m'a pour partager leur bonheur. Je n'ai plus de famille, plus de travail, plus de groupe social. Je suis seul et ce sentiment s'accentue dès que je pense à elle. Je peux le dire haut et fort, qui s'en soucie ? Qui se soucie de mon état ?

Ils m'ont abandonné dès sa mort, la mort de ma belle, de ma fiancée, de ma femme. Elle est partie si vite. Dans mes rêves, son rire est lointain, sa main m'échappe et ses yeux se perdent dans le vide. Je vais mal. Je n'ai plus d'attache alors pourquoi rester en vie, loin de ma bien aimée ? Elle, elle se soucie de moi. Je l'entends parfois. Je ne suis pas fou. Sa voix m'appelle. Même avant, qui se souciait de son cancer ? Outre les médecins qui cherchent à s'engraisser sur nous, personne.

Nous étions tout l'un pour l'autre. Mais elle n'est plus là. Je meurs de plus en plus vite. Bientôt, je m'éteindrais pour la rejoindre. La vie des autres n'en changera pas pour autant. Ma vie n'est pas plus intéressante qu'un veuf du cancer.